Nous sommes à table avec des amis. Les conversations fusent de part et d’autre de la table : actualité, famille, dernières expériences, conférences, pièces de théâtre… Des rires, du sérieux, du léger. Naturellement, les sujets habituels reviennent. Entre autre, mes passions, mes causes, mes coups de gueule, le plaisir : Frankl, Orval, Granges Pleines, Burn Out, Turquie, Technologies Disruptives, etc.
C’est dans ce contexte que cette histoire fut contée…
L’histoire se passe dans les années 40. Albert Einstein est aux États-Unis pour une série de conférences scientifiques. Le programme est chargé et les villes qui le réclament nombreuses. Chaque jour, Einstein repart dans la voiture avec chauffeur mise à sa disposition. Les semaines passent, les villes se succèdent et une certaine routine s’installe.
Un jour, tandis qu’Einstein et son chauffeur discutent au sujet de ces conférences, celui-ci lui dit: «À force de vous écouter jour après jour, je connais tellement bien votre conférence que je pourrais la donner à votre place…»
Einstein sourit et répond: «Chiche!» (Il faut préciser qu’à cette époque, peu de gens connaissaient la tête d’Einstein.)
Le lendemain, la salle est pleine. Einstein s’installe au fond, debout, près de la porte comme le fait son chauffeur habituellement. La conférence commence et l’imposteur ne s’en sort pas mal du tout. Personne ne semble se douter de quelque chose.
À la fin de la conférence toutefois, un homme se lève et pose une question très technique sur la théorie d’Einstein. Une question à laquelle évidemment, le chauffeur est bien en peine de répondre…
Le faux conférencier regarde un instant l’homme dans le public, puis pointe son index vers le fond de la salle et dit: «Monsieur, votre question est tellement banale* que c’est mon chauffeur qui va vous répondre!»
Se non è vero è bene trovato
Au-delà de la boutade, que tirer de cette histoire ? Ce qui me vient de prime abord, c’est le plaisir, la joie d’être ensemble, de se connaître, de se respecter, de rester léger et ne pas se prendre au sérieux. Et de jouer. De soi. Avec soi. Avec de la compréhension, de l’amour. Sans amorce de jeux psychologiques**. C’est, au-delà du passe-temps Berniens, une sorte de rituels instaurés avec la famille et les amis.
J’avais un grand père, qui, à chaque fête, racontait les mêmes histoires. On les connaissait par cœur. Elles revenaient et on avait plaisir à les entendre. On les racontait en même temps que lui. Et encore aujourd’hui, avec mon premier associé, Christian, qui connaissait cette histoire familiale, on rit de nos propres rituels. Plaisir. Et je pense à lui. Il est là.
Sur un deuxième niveau de réflexion, je pense aux quatre besoins de la personne humaine.
Le premier, le besoin d’éprouver un sens à sa vie. On dit aussi donner ou trouver un sens à sa vie. Ou orienter sa vie vers le sens.
Les trois autres, les besoins de structure, de stimulation et de reconnaissance. (Dixit l’AT)
Et je perçois ces discussions thématiques, habituelles, enflammées, vivantes, comme des tentatives de réponse à ces besoins. Chouette, hein ! Je me dis que l’être humain est bien construit. Et puis, cool, c’est la vraie vie.
Enfin, je pense à notre posture en tant que coach, notre attitude avec et vis à vis de nos clients, individuels ou équipes.
Quand ils disent et redisent, disent-ils la même chose ? Qu’est-ce que cela dit d’eux, de leur chemin, de leur croissance ? Comment parlent-ils de leurs granges pleines, de leurs valeurs? Comment les accompagner pour valoriser une prise de hauteur, des ouvertures d’options, des décisions d’agir, le premier pas ?
Entends-je la même chose à chaque fois ? Quelles sont mes émotions à ces moments-là ? Que disent-elles de moi, de l’autre, de la relation ? Qu’est-ce que j’en fais ? Les utiliser, les taire, les expliciter, les nommer ?
Je pense à la 8ème thèse de Frankl : la personne est dynamisme. Elle est un être en relation, de relation, qui se construit dans la relation, dans le regard de l’autre. Et c’est un cadre de croissance identitaire que je peux offrir à la personne, aux équipes que je coache, quand je leur offre cet espace où ils pourront se dire. Et agir.
Se dire est donc le premier espace nécessaire à la croissance.
Réjouissons-nous, nous sommes vivants !
Et vous, quels vont vos thèmes habituels, principaux ? Que disent-ils de vos valeurs ? Comment les mettez-vous en œuvre actuellement ? Quel prochain petit pas envisagez-vous de poser ?
* « banale ». L’utilisation de ce mot m’a choqué à la première lecture. Cependant, l’histoire est-elle vraie ? Rien n’est moins sûr.
** jeux psychologiques et jeux de pouvoir feront l’objet d’un prochain post.
Sur le premier niveau, qui est de raconter des histoires, tu le fais si bien, Philippe, que c’est toujours un plaisir de t’écouter ou de te lire. Merci !
Béatrice
Merci Béatrice, je prends. Et je trouve chouette d’avoir ton commentaire, sur ce premier niveau aussi. A tout bientôt Philippe
Quel plaisir de te lire et de t’écouter!
Encore Welcome. Indéfectible. Padre